L’amélioration de l’alimentation du troupeau pour réduire l’empreinte carbone en élevage bovins
09 Avril 2024
09 Avril 2024
7 min
Pourquoi s’intéresser à la ration des animaux ?
Pour réduire les émissions de GES dans un élevage, l’alimentation des animaux apparait comme l’un des principaux leviers à actionner. Les rations doivent être équilibrées afin de concilier les objectifs de production, les besoins physiologiques (entretien, lactation, gestation…) ainsi que la santé des animaux.
Par exemple, pour une vache laitière en lactation, une ration équilibrée va saturer sa capacité d’ingestion et lui apporter l’énergie (en Unité Fourragère Laitière = UFL), la matière azoté (en Protéines Digestibles dans l’Intestin = PDI), les minéraux, les oligo-éléments, les vitamines et l’eau dont elle a besoin pour produire X kg de lait par jour (avec un taux protéique et un taux butyreux de X) mais aussi pour “s’entretenir” (maintien de la température corporel, se déplacer…), couvrir les besoins de gestation…
La recherche de l’efficience alimentaire : pour réduire l’empreinte carbone et les charges d’alimentation !
Il ne faut pas confondre efficacité et efficience ! Alors que l’efficacité va simplement se mesurer par l’atteinte d’objectifs et les résultats, l’efficience va se mesurer par les moyens déployés pour atteindre des résultats. En clair, une vache efficiente sera celle qui aura consommé le moins de ressources alimentaires pour le même résultat.
L’alimentation à un effet direct et indéniable sur la production en matières premières des animaux (lait, viande…), mais il serait faux de mesurer et comparer l’efficience des animaux simplement sous le prisme de la production, lorsque l’on sait l’impact qu’à l’alimentation sur d’autres paramètres tels que les performances de reproduction, les problèmes sanitaires…
Par exemple, si l’on compare deux vaches laitières :
- La vache 1 ingère 0,70 kg de matière sèche pour produire un litre de lait
- La vache 2 ingère 0,80 kg de matière sèche pour produire un litre de lait
On pourrait penser que la vache 1 est plus efficiente, mais si l’on regarde plus en détail :
- La vache 1 est en moyenne à 40g/kg de taux butyreux et 32g/kg de taux protéique, son intervalle vélage-vélage est de 420 jours et il aura fallu 3 inséminations pour que la vache soit fécondée.
- La vache 2 est en moyenne à 42g/kg de taux butyreux et 35g/kg de taux protéique, son intervalle vélage-vélage est de 390 jours et il aura fallu 2 inséminations pour que la vache soit fécondée.
En conclusion, la vache 2 peut être considérée comme la plus efficiente, grâce la qualité supérieure de son lait, son temps d’improductivité plus bas (lié à l’intervalle vêlage-vêlage) et son meilleur taux de fertilité.
Et si tous ces indicateurs sont importants pour la réduction du bilan carbone d’une vache, ils le sont aussi pour la performance économique de l’exploitation !
Produire bas carbone, c’est aussi privilégier les matières premières cultivées à proximité de l’exploitation
En France, nous avons la chance de pouvoir produire une grande quantité de fourrage à proximité des exploitations. Ces fourrages (herbe, maïs, paille…) sont très souvent utilisés comme aliment grossier dans une ration et doivent être complétés par des aliments plus concentrés (notamment pour l’apport en protéines, par exemple du tourteau de soja). Ces concentrés ne sont majoritairement pas produits en France, mais dans des pays comme les Etats-Unis, le Brésil, l’Argentine… où les normes sont différentes de notre cadre européen et favorisent parfois la déforestation.
Pour lutter contre cette pollution importée et pour favoriser une auto-suffisance en protéine, de nombreux agriculteurs choisissent de changer leurs pratiques pour produire eux-mêmes des protéines, ou encore d’acheter des matières premières françaises ou européennes. Ces changements peuvent engendrer des couts supplémentaires pour les éleveurs, qui peuvent donc être en partie pris en charge par la valorisation de leurs réductions d’émissions !
Il est cependant important de rappeler que les élevages de bovins en France sont autonomes en protéine à hauteur de 75% (notamment grâce à nos prairies !) et consomment 3,5 Mt de tourteaux de soja (importés à 95%). Les efforts doivent donc se concentrer autour de cette importation de protéine, qui coute chère sur le plan économique, mais aussi et surtout sur le plan environnemental.
Quels sont les leviers à actionner dans le cadre de la certification au Label Bas Carbone ?
Chez France Carbon Agri nous utilisons la méthode Carbon Agri qui regroupe plusieurs leviers classés pas le nombre de fréquence d’utilisation :
- Optimisation de la consommation d’aliments concentrés : apporté en excès, ils ne sont pas digérés et se retrouvent en grande quantité dans leurs déjections entrainant une pollution du milieu.
- Augmentation de l’autonomie en protéines : Moins d’aliments importés, ce qui permet de réduire les émissions liées au transport de ces aliments.
- Remplacer le soja par du colza ou autres co-produits : Le soja est majoritairement importé. Le remplacer permet de réduire les émissions liées à son importation.
- Augmentation de la qualité des fourrages : les fourrages de meilleure qualité sont plus ajustés aux besoins physiologiques des animaux.
- Optimisation de la teneur en azote de l’alimentation : apporté en excès, l’azote n’est pas digéré par les animaux et se retrouve en grande quantité dans leurs déjections entrainant une pollution du milieu.
- Ajout de lipide dans l’alimentation : Les lipide permettent de réduire les émissions de méthane liées à la digestion des ruminants.
Dans le cadre de notre dernier appel à projet (1006 exploitations), nous avons pu relever 476 leviers actionnés en lien avec l’alimentation des animaux et l’autonomie protéique des exploitations. Environ 20% des exploitations choisissent de travailler sur l’optimisation des concentrés dans la ration et environ 10% des exploitations ont prévu remplacer en toute ou partie les tourteaux de soja (souvent importés) par des tourteaux de colza (produits majoritairement en France).